Quel est le lien entre le Marathon de Paris, qui aura lieu ce dimanche 9 avril, et la vie de Janet, qui habite un petit village au pied du Mont Kenya ? C’est le foyer à bois qu’elle utilise pour cuisiner. Ce foyer, qui consomme 60% moins de bois qu’un foyer traditionnel, a changé la vie de Janet et de 60 000 familles au Kenya. Moins de bois brûlé c’est moins d’arbres coupés et moins d’émissions de gaz à effet de serre. Ce grand projet, financé par le fonds carbone Livelihoods, permet de compenser une large part des 26 000 tonnes de CO2 émises par le Marathon de Paris. Une solution simple et efficace mise en œuvre grâce à la coopération entre de grandes entreprises et des communautés rurales.
Le bois :
ressource indispensable et danger quotidien
Dans la plupart des pays d’Afrique, le bois est la première source d’énergie pour les communautés rurales. Au Kenya, 95% de la population des villages n’a pas accès à l’électricité et 8 femmes sur 10 utilisent le bois pour cuisiner. C’est le cas de Janet.
Avant, comme toutes les femmes de son village, elle utilisait un foyer traditionnel, un « jiko », qui consiste en 3 pierres disposées en cercle à même le sol. La famille de Janet consommait environ 13 kilos de bois par jour. Comme les forêts autour des villages ont disparu depuis longtemps, elle devait marcher 2 à 3 heures pour en trouver et transporter des lourds fagots. Dans la tradition kenyane, seules les femmes et les jeunes filles peuvent ramasser du bois et cuisiner. Une corvée épuisante pour l’immense majorité des femmes africaines.
De retour chez elle, Janet passait de longues heures à cuisiner et à respirer les fumées nocives émises par les foyers ouverts. Quand elle utilisait son « jiko » traditionnel, sa maison était noyée dans un épais brouillard de fumée blanche alors qu’à l’intérieur les murs étaient noircis d’une épaisse couche de suie. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’exposition à ces fumées équivaut à fumer 2 paquets de cigarettes par jour. Maladies respiratoires, infection des yeux, ces fumées toxiques causent la mort de 15 000 personnes, dont 8 000 enfants*, tous les ans au Kenya (deuxième cause de mortalité après la malaria).
D’année en année, Janet a vu les dernières forêts autour de son village disparaître sous les coups de machette des femmes bien obligées de se fournir en bois pour cuisiner. Au Kenya, environ 50 000 hectares de forêts disparaissent tous les ans, soit près de 5 fois la superficie de Paris. En plus des conséquences environnementales, la perte des forêts entraîne la dégradation des terres arables et exerce des pressions conséquentes sur les ressources en eau, mettant en péril la sécurité alimentaire des habitants.
Une technologie simple mais à fort impact
En Swahili, « Hifadhi » signifie « préserver ». C’est le nom donné au projet du fonds Livelihoods pour traduire son double objectif : préserver les forêts pour contribuer à lutter contre le changement climatique et aussi préserver la santé des femmes. Pour permettre à un tel projet de toucher un très grand nombre de familles, il fallait une technologie efficace, pour générer des bénéfices tangibles, peu coûteuse, pour la rendre abordable au plus grand nombre, et simple, pour pouvoir être mise en œuvre à grande échelle.
Le foyer amélioré Hifadhi permet ainsi à Janet de réduire d’environ 60% sa consommation de bois. Le foyer, mis au point par des ingénieurs kényans, est plus efficace en énergie et retient la chaleur plus longtemps grâce à sa forme particulière ainsi qu’à la céramique et aux pièces métalliques qui le composent. Au-delà du bénéfice environnemental, ce foyer a changé le quotidien de Janet. Plus que 2 sorties par semaine au lieu de 4 ou 5 pour ramasser du bois. Un vrai gain de temps et d’énergie pour s’occuper de sa famille et faire d’autres activités. De plus, comme le foyer émet considérablement moins de fumée et permet de cuisiner plus rapidement, Janet et ses enfants sont en meilleure santé.
Ces foyers améliorés ne sont pas offerts aux familles mais vendus à un prix qui les rend accessibles au plus grand nombre. Janet a ainsi payé son foyer 300 shillings kenyans, soit 2,70 euros. Une partie du prix de revient du foyer ainsi que les coûts de distribution permettant d’aller jusqu’aux plus petits hameaux sont pris en charge par le fonds Livelihoods dans le cadre de son investissement carbone.
Quand l’équipe de Climate Pal, filiale de la société française EcoAct, chargée de la mise en œuvre du projet Livelihoods sur le terrain, est venue dans son village pour sensibiliser les habitants aux dangers des foyers ouverts et des conséquences de la déforestation, Janet n’a pas hésité à sauter le pas. Ce foyer représente un investissement sur le long terme pour la santé de sa famille mais aussi un acte d’engagement pour protéger le peu d’arbres qui subsistent autour de son village. Janet a ensuite été formée à la bonne utilisation du foyer. Chaque année, un membre de l’équipe du projet passe chez elle pour vérifier qu’il fonctionne bien. Si son foyer est endommagé ou s’il perd en efficacité énergétique, il sera réparé ou remplacé. Par conséquent, plus de 150 000 foyers Hifadhi seront distribués sur les dix années du projet. La mise en place et le suivi du projet, la construction, la distribution et la réparation des foyers ont déjà permis la création de plus de 200 emplois directs et indirects dans les alentours d’Embu.
Du village de Janet jusqu’aux Champs Élysées
Derrière le foyer de Janet et les milliers d’autres du projet Livelihoods-Hifadhi, il y a l’engagement de 10 entreprises qui ont investi dans le fonds carbone Livelihoods : Schneider Electric, Danone, Hermès, Crédit Agricole, Michelin, SAP, Firmenich, Voyageurs du Monde, La Poste, Caisse des Dépôts.
Toutes ces entreprises sont engagées dans la réduction de l’empreinte carbone de leurs propres activités mais elles se sont réunies pour aller plus loin : compenser une partie de leurs émissions de gaz à effet de serre grâce à des projets qui profitent directement à des communautés rurales de pays en développement. Ainsi, les foyers améliorés du projet Livelihoods-Hifadhi permettront d’éviter l’émission de plus d’un million de tonnes de CO2 sur 10 ans. Les crédits carbone ainsi générés permettent à Schneider Electric, sponsor du marathon de Paris, de compenser l’empreinte environnementale du marathon.
Quant à Janet, c’est en chanson qu’elle entame le repas du dimanche avec sa famille et ses amis. Bientôt, elle plantera autour de sa maison les jeunes arbres qu’elle a reçus, dans le cadre du projet Livelihoods – Hifadhi, pour contribuer à la reforestation au Kenya. Une nouvelle façon pour elle de continuer à bâtir un avenir meilleur pour ses enfants.